Vente de gré à gré et droit de préemption du locataire commercial

Vente de gré à gré et droit de préemption du locataire commercial

Le locataire commercial de l'immeuble objet de la vente de gré à gré ne pouvant exercer de droit de préemption, il est irrecevable à former un recours contre l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente dans ces conditions.

A la suite de la liquidation judiciaire d'une société, le juge-commissaire a autorisé la vente de gré à gré d'un immeuble de la débitrice. Aucun recours n'a été formé contre cette ordonnance.
Le notaire chargé de la rédaction de l'acte de cession a notifié le projet de vente au locataire de locaux commerciaux situés dans l'immeuble, et l'a informé de l'existence à son profit d'un droit de préemption. Ce dernier a confirmé vouloir exercer ce droit.

Le liquidateur a saisi le juge-commissaire, exposant les difficultés causées par cette notification tandis que le projet d'acte de vente préparé par le notaire stipulait une clause selon laquelle la vente portait sur un immeuble vendu dans sa globalité donné pour partie à bail commercial, ce qui constituait, selon lui, "une exemption au droit de préférence du preneur commercial".
Le juge-commissaire a rétracté l'ordonnance autorisant la vente de gré à gré, ordonné l'ouverture d'un nouvel appel d'offres pour l'acquisition de l'immeuble et ordonné la notification de l'ordonnance, notamment au locataire et au dirigeant de la débitrice.

La cour d'appel de Paris a annulé pour excès de pouvoir l'ordonnance de rétractation.
Les juges du fond ont retenu que le juge-commissaire était dessaisi de son pouvoir dès le prononcé de sa décision autorisant la vente, à l'égard de laquelle aucun appel, aucune opposition, tierce-opposition ou recours en révision n'avait été effectué. Le liquidateur ne pouvait faire juger la difficulté tenant à l'application du droit de préemption du locataire que par la voie de l'appel.

Dans un arrêt du 23 mars 2022 (pourvoi n° 20-19.174), la Cour de cassation considère que la vente de l'immeuble autorisée par le juge-commissaire au titre des opérations de liquidation judiciaire de la débitrice ne pouvant donner lieu à l'exercice d'un droit de préemption par le locataire, les droits et obligations de celle-ci n'étaient pas affectés par l'ordonnance initiale contre laquelle elle n'était donc pas recevable à former un recours.

La chambre commerciale précise en effet que la vente de gré à gré d'un actif immobilier dépendant d'une liquidation judiciaire est une vente faite d'autorité de justice.
Il en résulte que les dispositions de l'article L. 145-46-1 du code de commerce, qui concernent le cas où le propriétaire d'un local commercial ou artisanal envisage de le vendre, ne sont pas applicables et qu'une telle vente ne peut donner lieu à l'exercice d'un droit de préemption par le locataire commercial.
Le recours contre une ordonnance du juge-commissaire rendue en application de l'article L. 642-18 du même code, qui doit être formé devant la cour d'appel en application de l'article R. 642-37-1, n'est ouvert qu'aux tiers dont les droits et obligations sont affectés par la décision.