Cession Dailly et déclaration de créance

Cession Dailly et déclaration de créance

A défaut de pouvoir spécial donné par écrit, le cédant Dailly n'a pas qualité pour déclarer la créance à la procédure collective de la caution du débiteur cédé pour le compte du cessionnaire, quand bien même il serait titulaire d'un mandat prévu dans la convention de cession de créance.

A la suite de la mise en redressement judiciaire d'une société, une société foncière a déclaré au passif de cette procédure collective une créance correspondant aux loyers dus par une autre société, également en redressement judiciaire, et dont la débitrice s'était rendue caution.
Cette créance a été contestée au motif que la société foncière n'avait pas qualité pour procéder à la déclaration de cette créance, celle-ci ayant fait l'objet d'une cession de créances professionnelles au profit de trois banques, cette cession ayant été notifiée au débiteur cédé.

La cour d'appel de Fort-de-France a jugé que la société foncière pouvait procéder à la déclaration de cette créance.
Les juges du fond ont retenu que cette société avait effectué cette déclaration avant la notification de la cession de la créance professionnelle au débiteur cédé et que, s'agissant des effets de cette cession avant la notification, la convention conclue entre le cédant et les cessionnaires stipulait que "l'emprunteur cédant, qui l'accepte, est constitué mandataire des prêteurs pour encaisser en son nom et pour son compte toutes créances cédées et engager à ses frais toutes mesures conservatoires ou d'exécution qui seront utiles et nécessaires à la conservation ou au recouvrement des créances cédées par l'emprunteur à l'encontre des débiteurs cédés."
Les juges en ont déduit qu'avant la notification de la cession de créance, la société foncière s'était vue confier, par les banques cessionnaires, le mandat non seulement de continuer à percevoir les loyers de la débitrice principale, mais également d'engager toutes mesures conservatoires ou exécutoires.
Ils ont ajouté qu'il résulte de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier que la société foncière restait garante, auprès des banques cessionnaires, du paiement des loyers dus par le preneur, de sorte qu'il lui appartenait de préserver leurs droits au passif de la procédure collective du preneur et de sa caution en procédant à la déclaration de créance.

Cette analyse est invalidée par la Cour de cassation : dès la cession de créances, intervenue avant la déclaration de créance, la créancière cédante était sans qualité, en l'absence d'un pouvoir spécial dont l'existence n'était pas relevée, pour déclarer la créance de loyers cédée, peu important qu'en l'espèce la déclaration ait été faite avant la notification de la cession à la débitrice cédée.
L'arrêt d'appel est donc cassé le 5 octobre 2022 (pourvoi n° 21-14.226).au visa de l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 12 mars 2014.