Figurer sur la liste des créanciers vaut-il déclaration de créance ?

Figurer sur la liste des créanciers vaut-il déclaration de créance ?

Le débiteur qui a porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire, en précisant l'identité de son créancier et le montant de la créance, est présumé avoir déclaré cette créance pour le compte du créancier tant que celui-ci n'a pas adressé la déclaration de créance.

Après sa mise en sauvegarde, un groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec) a remis au mandataire judiciaire, conformément à l'article L. 622-6 du code de commerce, Ia liste de ses créanciers, sur laquelle figurait une coopérative.
La créance de celle-ci a été contestée par le Gaec, qui a fait valoir que le seul fait que ce créancier apparaisse sur la liste des créanciers ne valait pas déclaration de créance faite par le débiteur pour le compte du créancier, au sens de l'alinéa 3 de l'article L. 622-24 du code de commerce.

La cour d'appel de Dijon a rejeté la demande d'admission de sa créance formée par la coopérative.
Les juges du fond ont énoncé que, selon l'article R. 622-5, alinéa 3, du code de commerce, pour l'application du troisième alinéa de l'article L. 622-24 du même code, toute déclaration faite par le débiteur, dans le délai fixé par le premier alinéa de l'article R. 622-24, doit comporter les éléments prévus aux deux premiers alinéas de l'article L. 622-25 et, le cas échéant, ceux prévus par le 2° de l'article R. 622-23.
En l'espèce, les juges ont constaté que la liste des créanciers remise par le Gaec à son mandataire judiciaire comportait, dans la colonne des créanciers fournisseurs, la mention de la coopérative, de l'adresse de celle-ci et d'un montant dû estimé, échu et à échoir de 422.493 €. Ils ont retenu que cette liste ne comportait l'indication ni des sommes à échoir et de la date de leur échéance, ni de la nature du privilège ou de la sûreté dont la créance était éventuellement assortie, ni des modalités de calcul des intérêts dont le cours n'était pas arrêté, cependant qu'il n'était pas établi que le débiteur aurait fourni d'autres informations au mandataire judiciaire.
Les juges en ont déduit que cette déclaration faite par le Gaec ne pouvait valoir déclaration de créance faite par le débiteur pour le compte du créancier.

Ce raisonnement est invalidé par la Cour de cassation : la liste des créanciers remise par le Gaec à son mandataire judiciaire comportait le nom de la coopérative créancière ainsi que le montant de la créance de cette dernière, ce qui valait déclaration de créance effectuée par le débiteur pour le compte du créancier, dans la limite de ces informations.
L'arrêt est donc cassé le 8 février 2023 (pourvoi n° 21-19.330) au visa de l'article L. 622-24, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 12 mars 2014.