Licenciement économique : reprise de marché par une autre société

Licenciement économique : reprise de marché par une autre société

Il n'incombe pas au salarié, affecté à un marché repris et que l'entreprise entrante refuse de conserver à son service, d'établir qu'il remplit les conditions conventionnelles relatives à la garantie de l'emploi et à la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire.

Le contrat de travail d'une salariée, soumis à la convention collective des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011, a été repris par une société, avant que celle-ci ne soit placée en liquidation judiciaire.
Par lettre du même jour, le mandataire liquidateur a convoqué la salariée à un entretien en vue de son licenciement pour motif économique.
Le mandataire liquidateur a informé la salariée de la possibilité d'adhérer au contrat de sécurisation professionnelle en lui précisant qu'à défaut d'adhésion, cette lettre constituerait la notification du licenciement économique et que, sous réserve qu'elle soit bien salariée de la société liquidée, son contrat de travail serait transféré en cas de reprise du contrat de nettoyage par une autre entreprise.
Le mandataire liquidateur a informé la salariée de la reprise du marché de nettoyage par la société A.
Après que la Direccte a refusé à deux reprises d'homologuer la rupture conventionnelle signée entre la société A. et la salariée, celle-ci a été licenciée pour faute grave.
Elle a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement et obtenir paiement de diverses sommes.

La cour d'appel de Poitiers a débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes.
Elle a relevé qu'il résulte des dispositions de la CCN des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011 que le transfert du contrat de travail suppose que celui-ci soit en cours lors du changement de prestataire, le contrat de travail valablement rompu avant la reprise du marché n'étant plus en cours.
Elle a retenu que la salariée ne justifie ni même n'allègue avoir formalisé une adhésion au contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé par le mandataire judiciaire.
Elle en a déduit que, sans élément permettant d'établir que la salarié aurait adhéré au contrat de sécurisation professionnelle, il apparaît que le contrat de travail a été rompu avant la conclusion du marché de prestations de sorte qu'il n'a pu être transféré à la société A.

Dans un arrêt du 15 février 2023 (pourvoi n° 21-19.826), la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel.
La cour d'appel a violé l'article 7.2 de la convention collective des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011 en statuant ainsi, en faisant peser sur la salariée la charge de la preuve qu'elle remplissait les conditions conventionnelles relatives à la continuité de son contrat de travail et, notamment qu'elle était titulaire d'un contrat de travail.
En effet, il n'incombe pas au salarié affecté à un marché repris et que l'entreprise entrante refuse de conserver à son service d'établir qu'il remplit les conditions conventionnelles relatives à la garantie de l'emploi et à la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire.