Indemnisation des victimes en cas de relaxe par le juge pénal

Indemnisation des victimes en cas de relaxe par le juge pénal

Dans le cas d’une relaxe pour blessures ou homicide involontaires, la victime qui n’a pas réclamé au juge pénal la réparation de son préjudice, comme la loi l’y autorise dans cette hypothèse, conserve le droit de présenter au juge civil sa demande d’indemnisation.

Alors qu'il conduisait un véhicule de secours routier durant une intervention, un sapeur-pompier a été percuté par un automobiliste. Il est décédé des suites de ses blessures.

Le tribunal correctionnel a jugé l’automobiliste coupable d’homicide involontaire et accordé aux ayant droits de la victime, parties civiles, une indemnisation de leur préjudice causé par ce délit.
La cour d’appel a relaxé l’automobiliste et rejeté la demande de dommages-intérêts de la partie civile après avoir constaté que celle-ci n’invoquait pas devant elle l’article 470-1 du code de procédure pénale.
Les ayant droits se sont alors tournés vers la justice civile afin d’obtenir une indemnisation de la part de l’assureur de l’automobiliste. Leur demande a été jugée irrecevable par le juge civil qui a considéré que la demande aurait dû être formulée dans le cadre de la procédure pénale.

Par un arrêt du 6 juin 2019 (pourvoi n° 18-15.738), la Cour de cassation a invalidé ce raisonnement : selon elle, le fait de ne pas demander au juge pénal des dommages-intérêts dans l’hypothèse d’une éventuelle relaxe du prévenu ne privait pas la partie civile du droit de saisir ultérieurement le juge civil en réparation de son préjudice.
Dans son arrêt rendu sur renvoi après cassation, la cour d'appel n'a pas suivi cette analyse, se référant au principe de l’autorité de la chose jugée.
Cette position a conduit la Cour de cassation à examiner l’affaire en assemblée plénière.

Dans son arrêt rendu le 14 avril 2023 (pourvoi n° 21-13.516), celle-ci considère que la personne qui ne demande pas au juge pénal de statuer sur la réparation de son préjudice dans l’hypothèse d’une relaxe du prévenu auquel est reprochée une infraction non intentionnelle conserve le droit de soumettre sa demande d’indemnisation au juge civil, sans que lui soient opposés le principe de concentration des moyens et l’autorité de la chose jugée.

Elle précise la portée de cette solution en distinguant les deux hypothèses qui peuvent se présenter :
- si la partie civile n’a formé aucune demande d’indemnisation de son préjudice devant le juge pénal pour le cas où la personne poursuivie serait relaxée, alors elle peut soumettre celle-ci devant le juge civil ;
- si, au contraire, elle a formé sa demande devant le juge pénal, comme le lui permet l’article 470-1 du code de procédure pénale, alors elle doit, en application du principe de concentration des moyens, présenter l’ensemble des arguments fondant sa demande. En effet, elle ne pourra plus, ensuite, saisir le juge civil de la même demande.