Stewards : peut-on interdire aux hommes une coiffure autorisée aux femmes ?

Stewards : peut-on interdire aux hommes une coiffure autorisée aux femmes ?

Le fait pour un employeur de restreindre la liberté de ses salariés de sexe masculin dans leur façon de se coiffer constitue-t-il une discrimination fondée sur le sexe ?

Engagé par une compagnie aérienne en qualité de steward, un salarié s’est présenté coiffé de tresses africaines nouées en chignon à l’embarquement, lequel lui a été refusé par l’employeur au motif qu’une telle coiffure n’était pas autorisée par le manuel des règles de port de l’uniforme pour le personnel navigant commercial masculin.

Ce manuel donnait en effet les consignes suivantes :
- pour les hommes : "Les cheveux doivent être coiffés de façon extrêmement nette. Limitées en volume, les coiffures doivent garder un aspect naturel et homogène. La longueur est limitée dans la nuque au niveau du bord supérieur de la chemise." ;
- pour les femmes : "Les tresses africaines sont autorisées à condition d’être retenues en chignon."
Par la suite, le salarié a porté une perruque pour exercer ses fonctions.

La cour d'appel de Paris n'a pas accédé aux demandes du salarié qui soutenait être victime de discrimination.
Les juges du fond ont notamment retenu que la présentation du personnel navigant faisait partie de l'image de marque de la compagnie aérienne. Or, cette image de marque imposait le port de l'uniforme. Ils ont ajouté que la différence de coiffure entre homme et femme reposait sur des codes en usage.

La Cour de cassation invalide cette analyse dans un arrêt du 23 novembre 2022 (pourvoi n° 21-14.060).
Pour la chambre sociale, la différence de traitement qui consiste à autoriser les femmes à porter des tresses africaines attachées en chignon mais à l’interdire aux hommes est uniquement fondée sur le sexe du salarié : elle n’est justifiée par aucune exigence essentielle et déterminante propre à l’exercice de la profession de steward.
D’une part, c’est l’uniforme qui permet aux clients d’identifier le personnel navigant. Contrairement à un chapeau, dont le port peut être imposé et qui contribue à cette identification, la manière de se coiffer n’est ni une partie de l’uniforme ni son prolongement.
D’autre part, les codes sociaux ne sont pas des critères objectifs qui justifient une différence de traitement entre les hommes et les femmes. La prise en compte d’une perception sociale courante de l’apparence physique des genres masculin et féminin n’est pas une exigence objective nécessaire à l’exercice des fonctions de steward.
Dans le cadre de cette profession, il n’est donc pas possible d’interdire aux hommes une coiffure autorisée aux femmes.